Présence au Rwanda et au Burundi
L’arrivée des dominicains canadiens au Rwanda et au Burundi remonte à 1960. Elle est contemporaine — à quelques années près — de la venue des frères français en Afrique de l’Ouest et en Afrique Centrale, des frères suisses dans l’est du Zaïre et des frères américains au Kenya. C’est l’époque où dans plusieurs « pays de mission » en Afrique, de nouvelles congrégations religieuses sont appelées à compléter les actions des premiers missionnaires. Au Rwanda et plus tard au Burundi, comme dans les autres parties de l’Afrique, les dominicains ne sont pas invités à s’engager dans des activités de première évangélisation, mais plutôt à répondre aux besoins de jeunes Églises en plein développement. Les champs apostoliques des dominicains sont l’insertion dans les milieux urbains, la présence auprès des nouvelles élites, la pastorale du monde étudiant, la formation du clergé, l’insertion dans les médias… Cette nouvelle présence dominicaine en Afrique n’est pas liée à la prise en charge de diocèses ou vicariats apostoliques comme ce fut le cas pour nos frères du Congo, d’Afrique du Sud et du Nigeria
L’histoire dominicaine au Rwanda et au Burundi peut être divisée en quatre chapitres, correspondant à diverses implantations géographiques : Butare (1960-1974); Kigali-Biryogo (1974-1990); Kigali-Kacyiru (1990-…) et Bujumbura (1973…). Chaque étape de la présence dominicaine au Rwanda est marquée par un projet apostolique dominant et un style de vie communautaire approprié à ce projet, qui leur donnent une image bien définie dans le milieu. Après une brève période d’apprivoisement dans le pays, avec des engagements apostoliques variés, les dominicains concentrent la plus grande partie de leurs énergies à partir de 1963 sur la fondation de l’Université Nationale du Rwanda à Butare, qui devient leur étiquette. Quand les frères quittent le couvent de Butare pour vivre dans une petite maison de Biryogo, un quartier populaire de Kigali, c’est le Club RAFIKI, centre de culture et de loisirs, qui les identifie. Depuis 1990, suite à une réflexion communautaire liée à la célébration de 25 ans de présence dans le pays, les dominicains se retrouvent à Kacyiru, quartier administratif et résidentiel, avec une maison de noviciat, une chapelle publique et un centre de rencontre appelé « Centre Saint-Dominique ». La présence dominicaine au Burundi, qui débute de façon imprévue en 1973 avec l’arrivée d’un frère rwandais réfugié, est marquée davantage par des engagements individuels. La construction récente d’une maison et la présence d’une équipe plus stable de quelques frères devraient aider à donner une image plus précise à la présence dominicaine dans ce pays.
Pour comprendre l’histoire de l’Ordre dans cette partie de l’Afrique, le contexte socio-politique est très important. L’arrivée des frères au Rwanda en 1960 se situe au moment où le pays connaît de vives tensions sociales et ethniques. Le Rwanda et le Burundi obtiennent leur indépendance en 1962. Dès leur arrivée, les dominicains sont plongés dans cette problématique sociale et politique. D’autres « événements » tragiques vont se succéder au Rwanda, comme au Burundi, en particulier en 1972-1973 et à partir de 1990. Et ils auront chaque fois des répercussions sur la vie et l’engagement des dominicains dans ces pays. Suite à ces divers événements, des projets sont abandonnés, des frères expatriés retournent dans leur pays d’origine, d’autres frères quittent la vie religieuse et les communautés doivent être restructurées et prendre de nouvelles orientations. Les frères africains appartenant à l’un ou l’autre des deux groupes ethniques (hutus-tutsis) sont marqués par des « sensibilités » socio-politiques différentes, ce qui ne va pas sans influencer la vie des communautés. C’est peut-être là une forme d’inculturation de la vie dominicaine au Rwanda et au Burundi.
Un autre élément qui marque l’histoire dominicaine dans ces pays est précisément un certain souci d’africanisation et d’inculturation. Il n’est pas toujours facile de savoir s’il s’agit ici d’un processus conscient et délibéré ou plutôt d’une réaction imposée par la pression des événements. Dès les premières années de leur présence, les frères canadiens envisagent l’implantation de l’Ordre et procèdent au recrutement de novices rwandais. Dans les divers projets qu’ils entreprennent, ils cherchent à assurer le plus vite possible une prise en charge des responsabilités par des cadres nationaux (université, club RAFIKI, centre de formation coopérative, etc.). Pour le moment, le responsable du vicariat et les supérieurs des deux maisons de Kigali et Bujumbura sont des frères africains. La problématique de l’inculturation est au coeur de la recherche menée par plusieurs frères, qui ont déjà publié des livres et des articles nombreux aussi bien sur la culture traditionnelle que sur les problèmes actuels des deux pays. Pendant ces dernières décennies, les dominicains ont été partie prenante de l’histoire du Rwanda et du Burundi.