Spiritualité
La vie dominicaine qui tient compte de la riche diversité de ceux qui composent l’Ordre aujourd’hui, en même temps qu’elle est fidèle au projet initial de Dominique: un Dominicain est un être polarisé par la Parole, une Parole étudiée, célébrée, vécue et annoncée aux autres.
Le dominicain étudie la Parole
Saint Dominique n’a pas attendu le 21e siècle pour inventer le concept d’éducation permanente. Dominique, comme l’attestent les actes de sa canonisation, « exhortait souvent les frères de cet Ordre, de vive voix et par lettres, à étudier sans cesse le nouveau et l’ancien Testament. Il portait toujours sur lui l’évangile de saint Matthieu et les lettres de saint Paul, et il les étudiait tellement qu’il les savait à peu près par cœur. » L’étude dominicaine ne ressemble pas au « bourrage de crâne » des étudiants à l’approche des examens.
Son but premier n’est pas de faire avancer la science ou de faire naître le doux plaisir d’apprendre du neuf. Même avec des méthodes scientifiques, rigoureuses, le Dominicain cherche avant tout quelqu’un. Il aborde les sources du savoir comme l’amoureux lit une lettre à sa fiancée, y engageant son cœur avec autant d’ardeur qu’il y applique son intelligence. La recherche du Dominicain ressemble à l’attitude de Marie qui reçoit les interventions de Dieu, en reconnaît la valeur et les médite dans son cœur, les tournant, les retournant sans cesse jusqu’à la lumière en plénitude. L’étude est un acte contemplatif.
Le Dominicain célèbre la Parole
La liturgie importe au dominicain comme la nourriture est essentielle pour le corps. De par sa nature même, le Dominicain ne peut se passer de célébrer l’Office divin avec ses frères, sans devenir anémique et souffrir de carences graves. N’est-ce pas significatif que Dominique en prière ait été le sujet de prédilection des artistes et des chroniqueurs? On ne dit presque rien de la prédication du Père des Prêcheurs, alors qu’on s’attarde longuement sur sa prière. Pour Dominique, comme pour ses disciples, la prière – surtout la liturgie – est un acte de prédication. Composé presque uniquement de textes bibliques, l’Office nous amène à nous transmettre les uns aux autres, chacun à notre tour, des versets de la Bible. Nous nous confions les uns aux autres, les uns par les autres, chacun à notre tour, des versets de la Bible.
Nous nous confions les uns aux autres la Parole, en même temps que nous la retournons à Dieu. Comme un signe de la charité en plénitude, quand l’amour de Dieu et celui du prochain se confondent dans la même activité! À jouer ainsi avec la Parole, elle imprègne l’esprit, la mentalité, elle transforme la vie. L’acte liturgique est une action créatrice de Dieu à laquelle nous collaborons; avec Dieu nous permettons au Verbe de se faire toujours chair, de devenir notre propre chair au point que ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi (Galates 2, 20).
Le Dominicain vit de la Parole
Quelle témérité dans cette affirmation. Je la dis comme un idéal que nous recherchons et non comme une affaire classée. Notre communauté ne réunit pas des saints mais des pécheurs. C’est d’ailleurs parce que nous sommes pécheurs que nous rejoignons la famille dominicaine. Au moment de faire profession, ne demandons-nous pas la miséricorde de Dieu et celle de nos frères?
Quotidiennement, depuis sa fondation, chaque couvent est en travail de réconciliation, réconciliation de la personne avec elle-même, réconciliation avec les autres et avec Dieu. Nous voulons être signe du Royaume qui libère, signe de la miséricorde de Dieu. Nous réinventons, ou plutôt Dieu réinvente la Parole qui sauve. Notre fraternité cherche à devenir un Évangile vivant et une cellule d’Église.
Le dominicain annonce la parole
Nous ne vivons pas pour nous-mêmes. Notre étude vise à nous rendre capables d’être utiles au prochain, comme le dit la Constitution fondamentale. Notre prière nous fait contempler ce que nous livrerons aux autres. Notre communion nous fait vivre ce que nous voulons construire avec l’Église et le monde. Le salut du monde constitue notre seule raison d’être. « Que vont devenir les pécheurs? », criait saint Dominique.
Toute notre vie s’oriente vers les autres pour leur apporter la Parole qui sauve. Ils sont nombreux dans le monde à vivre loin de la Source, inconscients de leur soif, d’un sens à leur vie. C’est à eux tous que veut aller le Dominicain afin de leur proposer la Bonne nouvelle du Christ ressuscité.