Nouvelle profession religieuse pour notre Province

Le 31 août 2024, le frère Simon Lessard a fait ses premiers vœux en tant que dominicain pour la province Saint-Dominique du Canada. Il est originaire de Québec et est présentement « responsable des partenariats » au Magazine Le Verbe, un magazine qui veut « témoigner de l’espérance chrétienne dans l’espace médiatique en conjuguant foi catholique et culture contemporaine. »  Toutes nos félicitations au frère Simon Lessard.

Homélie donnée par le Prieur provincial à l’occasion de la profession du frère Simon Lessard, o.p.

Cher Simon, en choisissant cet évangile où Jésus demande à Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aime-tu ? » Il m’apparaît évident que nous sommes ici au cœur de ta profession de foi et où tu fais tien le cri du cœur de Simon Pierre : « Tu sais bien Seigneur que je t’aime. » Et que tu es prêt à aller partout où il te conduira à la suite de saint Dominique que tu choisis comme ton compagnon de route. 

Pour bien comprendre ce qui est au cœur de la vie dominicaine, il nous faut à la fois contempler l’Ordre dans sa mission ainsi que dans son histoire, ne perdant jamais de vue l’action apostolique de saint Dominique à la lumière de sa vie telle que rapportée par ses frères et ses sœurs. L’étude de notre histoire et de nos missions est primordiale, car Dominique ne nous a pas laissé d’écrits, sinon les premières Constitutions de l’Ordre qu’il a profondément marquées de son influence et qui nous aident ainsi à mieux saisir le zèle qui l’animait. C’est le Père Vicaire, un grand historien de l’Ordre au XXe siècle, qui affirmait :

« Il est des saints, tel François d’Assise, dont le visage est abordable à tous parce qu’ils apparaissent dans de nombreux récits clairs et colorés comme des enluminures. Il en est d’autres, tel Dominique, cachés en quelque sorte dans… la lumière de son œuvre qui fait d’une certaine manière écran[1]. » à notre fondateur, mais qui nous parle néanmoins de sa grande intuition missionnaire qui est sans limites, hors des cadres étroits du territoire d’une église abbatiale, d’un prieuré de chanoine ou même d’un diocèse

Faut-il le rappeler, saint Dominique était avant tout un homme d’Église, et une relecture de son action missionnaire n’a de sens qu’à partir de cette perspective où Dominique veut sauver l’Église du Christ devant les schismes et les hérésies qui menacent tout autour d’elle. Le monde à sauver, et l’avenir de l’Église ne font qu’un pour Dominique. Voilà qui va marquer profondément l’identité de l’Ordre et de tous ceux et de celles qui vont s’y engager à la suite de Dominique. 

Nous de la famille de saint Dominique, nous sommes d’Église, une Église qui doit sans cesse se convertir tout en se faisant la servante de tous. Nous sommes d’Église, une Église qui doit sans cesse se convertir en se faisant la servante de tous, et ce souffle qui anime notre être ensemble est avant tout apostolique. La vie dominicaine se vit avant tout dans une mission qui se définit et est reconnue par l’Église comme un prolongement de celle des Apôtres et, par le fait même, de celle du Christ. C’est une vie qui nous plonge au cœur de la mission de l’Église parce que tel était le lieu de la passion de Dominique. Notre vie dominicaine est façonnée, à jamais marquée par cette compassion qui habitait Dominique et qui le faisait gémir et pleurer la nuit dans sa prière : « Mon, mon Dieu, que vont devenir les pécheurs ? » 

Notre vie dominicaine en est donc une d’urgence pour le monde, car la bonne nouvelle de Jésus-Christ est méconnue et l’amour de Dieu souvent bafoué. Voilà ce qui rend vif et allègre le pas de Dominique, ainsi que de ceux et celles qui vivent l’Évangile à sa façon.

C’est pourquoi notre vie dominicaine en est une où Dieu se doit d’être notre tout, et le souci du prochain, le cœur de tous nos engagements. C’est pourquoi nous sommes appelés à marcher avec Dominique sur la route de l’itinérance, « parlant de Dieu ou avec Dieu », acceptant d’aller là où la mission nous conduit dans un discernement avec nos frères. Notre vie dominicaine ne fait pas de nous des moines, mais en même temps elle se nourrit d’étude, de prière, de silence et de contemplation, tout en étant portée par une communauté de frères qui assume et porte la prédication et la mission de chacun de ses membres. La vie dominicaine nous laisse donc une grande liberté d’action tout en nous appelant à une profonde vie d’intériorité et de relations fraternelles. 

Cette vie fait appel à notre liberté dans le Christ. Elle n’enferme pas dans des cadres étroits. Elle ouvre sur la créativité, la responsabilité et le grand large pour le bien de la mission. Déjà, cette orientation de notre Ordre étonnait dès les tout débuts de sa fondation, ce qui amenait le bénédictin Mathieu de Paris, au XIIIe siècle, à s’indigner en voyant les premiers dominicains qui quittaient leurs couvents pour aller prêcher l’évangile sur les routes, ce qui était plutôt inédit à leur époque. Mathieu de Paris disait au sujet des frères dominicains, tel un reproche : « ils ont pour cloître l’univers et l’océan pour clôture ! ». Et c’est là notre fierté!

C’est pourquoi cette liberté qui est la nôtre implique aussi une grande confiance en l’autre, dans les frères et les sœurs avec qui nous cheminons. « Que demandez-vous ? », demande le prieur provincial lorsqu’un frère fait profession : « La miséricorde de Dieu et la vôtre », répond le frère profès. Pensons ici à Dominique qui accepte de donner l’argent de poche à un frère qui refusait de partir sans argent comme il lui demandait de le faire. Pas d’autoritarisme ici en dépit des glissements de certaines époques. C’est la confiance et la miséricorde fraternelle qui l’emportent sur la loi.

Et c’est là une dimension qui m’a toujours frappée dans notre Ordre. Bien des fois j’ai entendu des chrétiens et des chrétiennes m’avouer qu’ils avaient toujours aimé aller se confesser chez les Dominicains à cause de l’accueil qu’ils y trouvaient, un accueil fraternel et sans jugement. 

C’est là une attitude qui est très révélatrice du ministère fécond d’un grand nombre de nos frères, car la vie dominicaine implique une vision positive de l’homme et du monde, une vision ouverte sur la grâce de Dieu et sa miséricorde, un amour sans feinte pour tout homme, toute femme, rencontrés sur le chemin de la mission. Pensons à Dominique passant la nuit à discuter avec un aubergiste cathare. Il n’y a certainement ni mépris ni rejet de l’autre dans une telle attitude chez Dominique, alors qu’il se trouve avec un hérétique. Tout au contraire. On ne trouve chez lui que le souci de sauver son frère, et en ce sens notre mission en est une du dialogue avec l’autre et avec le monde.

 Simon, il y a maintenant huit-cents ans, Dominique de Guzman, contemplant les horizons lointains d’Osma et de Caleruega où il vivait comme chanoine, a su entendre l’appel du Seigneur jusqu’aux steppes lointaines où vivaient ceux et celles qui ignoraient tout de la bonne nouvelle de Jésus Christ et que l’on appelait les Cumans. C’est ce même appel qui résonne encore aujourd’hui pour toi et pour tous ceux et celles qui s’inspirent de ce jeune chanoine castillan, appelés avec lui à nous tenir aux frontières des grands enjeux de notre monde. Et si nous, Dominicains, nous avons planté notre tente dans le jardin de Dominique, c’est parce que nous y vivons une filiation spirituelle avec son charisme de héraut de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, ainsi que son ardente compassion pour le monde. Que ton engagement dans l’Ordre des Prêcheurs par la promesse de tes vœux, cher Simon, te donne la grâce de poursuivre l’approfondissement de ton appel à suivre le Christ à la manière de saint Dominique.  Si tu t’y donnes tout entier, tu y trouveras le plus grand bonheur qui soit. Promesse de Jésus Christ !

Fr. Yves Bériault, o.p. Prieur provincial


[1] Préface du livre de Guy Bedouelle : Dominique ou la grâce de la parole. Fayard-Mame, 1982. p.7.

Érection du nouveau vicariat de Suisse de la province de France

Le 3 février 2024, les frères de la Province de Suisse et des frères délégués de la Province de France se sont réunis à Fribourg autour du Maître de l’Ordre, frère Gerard Francisco Timoner III, OP, afin de procéder à la suppression de la Province de Suisse et à l’érection du Vicariat de Suisse de la Province de France. 

Après la lecture du décret de suppression de la Province de Suisse et d’érection du vicariat, le provincial de France, frère Nicolas Tixier, OP, a institué le frère Didier Boillat, OP, comme premier vicaire provincial du vicariat de Suisse. Dans son allocution bilingue, le frère Nicolas a chaleureusement remercié le frère Benoît-Dominique de la Soujeolle, OP, qui a accompagné la Province de Suisse dans la préparation de ce changement institutionnel rendu nécessaire pour les besoins de la mission de l’Ordre en Suisse. 

Le Maître de l’Ordre a rendu grâce pour les centaines de frères, sœurs et laïcs de l’Ordre qui depuis des siècles ont servi le message de l’Évangile en Suisse par leur parole et par leur présence. Il a insisté sur le fait que cette adaptation de statut ne signifie pas la fin de la mission de l’Ordre en Suisse. Bien au contraire, l’expérience internationale de la Province de France permettra d’insuffler un nouveau souffle à la prédication dominicaine dans la confédération.

Nouveau prieur provincial pour la province d’angleterre

Nicholas Paul Crowe, OP, est le nouveau prieur provincial.

Réunis en chapitre, les frères de la province d’Angleterre ont élu le frère Nicholas Paul Crowe, OP comme nouveau prieur provincial. Son élection a été confirmée par le Maître de l’Ordre, le frère Gérard Francisco Timoner III, OP, le 9 avril 2024.

« Deo gratias ! C’est avec joie que les frères annoncent l’élection d’un nouveau prieur provincial, le frère Nicholas Paul Crowe, OP, qui a été élu et confirmé par le Maître de l’Ordre aujourd’hui, 9 avril 2024 », écrivent les frères de la province d’Angleterre. Dans l’après-midi, après les vêpres, la lettre de confirmation du Maître de l’Ordre a été lue et le frère Nicholas a fait sa profession de foi et prêté serment de fidélité, prenant ainsi ses fonctions et succédant au frère Martin Ganeri, OP.

Frère Nicholas a grandi à Stevenage, près de Londres. Après avoir étudié la géographie à l’université de Cambridge et passé une année à travailler avec les Dominican Volunteers International aux Philippines, il est entré au noviciat en 2008. Après son ordination, il a été nommé promoteur et directeur des vocations pour la province anglaise, fonction qu’il a occupée pendant plusieurs années avant de poursuivre des études de théologie morale à l’université de Fribourg. À l’issue de ces études, il a été élu prieur de Cambridge en 2022, prieur d’Oxford en 2023 et maintenant prieur provincial de la province d’Angleterre.

Le chapitre se poursuit maintenant à Oxford sous sa présidence, alors que les capitulaires discutent des besoins de la mission dominicaine en Angleterre, en Écosse et en Jamaïque, travaillent à la mise en œuvre de plans et nomment des frères pour faire avancer la mission de l’Ordre pour le salut des âmes. « Merci de continuer à prier pour nous, et en particulier pour le frère Nicholas, qui s’est vu confier cette responsabilité pour les quatre prochaines années. Que Dieu, qui a commencé cette bonne œuvre, la mène à sa perfection dans le Christ. Que la bienheureuse Vierge Marie, reine du saint Rosaire et patronne de l’Ordre des Prêcheurs, prie pour nous », demandent les frères de la province d’Angleterre.

Le mois dominicain de la paix 2024 sera pour Haïti

‘« Engageons-nous pour la Paix et la Dignité Humaine » Haïti 2024

Chaque année, du premier dimanche de l’Avent à la solennité de l’Épiphanie du Seigneur, est célébré le Mois Dominicain de la Paix, au cours duquel la Famille Dominicaine programme des activités pastorales et propose des intentions de prière pour un pays spécifique, qui cette année sera Haïti et aura pour devise « Engageons-nous pour la paix et la dignité humaine ».
À l’occasion du Mois dominicain de la paix, le Maître de l’Ordre écrit une lettre dans laquelle il donne des indications sur la manière de le vivre. En outre, le site officiel de l’Ordre, www.op.org, partage du matériel lié aux activités pastorales et aux intentions de prière préparées par la famille dominicaine.
Ces dernières années, les mois dominicains pour la paix ont été consacrés à l’Amazonie en 2023, au Myanmar en 2022, à l’Ukraine en 2020, à la République démocratique du Congo en 2018 et à la Colombie en 2017.

Entretien avec le père Jean-Michel Poffet, maître en sacrée théologie

Rappeler au monde d’aujourd’hui qui souffre de la violence que dieu s’est révélé comme un Dieu de libération

Magister in Sacra Theologia

« Le monde actuel souffre à nouveau sous beaucoup de violences non seulement sur les terrains de guerre mais aussi dans le langage, la politique, les relations humaines jusque dans le couple, la famille etc. Il y aussi un grand manque d’espérance »

Jean-Michel Poffet, OP, qui a reçu le diplôme de Maître en Sacrée théologie1 de l’Ordre des Prêcheurs en 2023, dans une interview accordée aux médias de l’Ordo Praedicatorum :

Qu’est-ce que cela signifie pour vous d’avoir reçu le diplôme de maître en sacrée théologie du Maître de l’Ordre ?

J’ai été évidemment très honoré que ma Province ait choisi de me proposer à la MST et que le Maître de l’Ordre me l’ait accordée. La laudatio a souligné le lien que j’avais toujours essayé de privilégier entre l’étude de l’Écriture sainte et la prédication au sens large. Tout ce qui pouvait éclairer non seulement le passé des textes étudiés mais leur futur pour le peuple de Dieu. Je ne puis qu’être encouragé à poursuivre dans ce sens.

En tant que maître en sacrée théologie, comment voyez-vous la contribution théologique actuelle de l’Ordre pour l’Église et pour le monde ?

Le monde actuel souffre à nouveau sous beaucoup de violences non seulement sur les terrains de guerre mais aussi dans le langage, la politique, les relations humaines jusque dans le couple, la famille etc. Il y aussi un grand manque d’espérance. Il me paraît donc urgent de chercher à mettre en lumière la Révélation d’un Dieu qui est « ami des hommes », qui est un Dieu de libération, qui l’a montré avec Moïse et surtout avec Jésus. Et Jésus, lui-même blessé, montre ses plaies à ses disciples après sa résurrection, tout en leur confiant la paix et le pardon. Un vrai programme d’humanisation…

Dans un contexte de révolution technologique, comment aborder l’interprétation biblique ?

Les outils à notre disposition facilitent l’étude biblique, offrent une documentation historique, archéologique, linguistique. Mais rien ne remplacera jamais l’herméneutique : c’est-à-dire l’interprétation, à la lumière de la foi, des textes bibliques. Non seulement la quête de ce qu’un auteur ancien a voulu dire, mais ce qu’un texte inspiré peut encore dire pour aujourd’hui et pour demain. L’Esprit Saint accompagne cette recherche et ce service rendu à l’Église.

Quelles sont vos suggestions pour les biblistes qui souhaitent mettre en œuvre un projet de pastorale biblique ?

J’ai moi-même pendant des années présidé et animé une Association biblique en Suisse romande, organisant des sessions annuelles et accompagnant le travail en petits groupes tout au long de l’année. Il faut tenir ensemble deux pôles : la fidélité à la Parole de Dieu avec une exigence quant au contenu transmis, et une pédagogie permettant à des gens sans formation universitaire et parfois même avec très peu d’étude de comprendre la Parole de Dieu et de bénéficier de sa lumière. Nous avons toujours pris garde d’intégrer des non-universitaires, des femmes et pas seulement des hommes ou des clercs, des plus jeunes aussi.

Que pensez-vous de la croissance du pentecôtisme en Amérique latine et en Afrique, définis comme des “continents de l’espoir” ?

Je ne puis répondre à cette question car je ne connais pas suffisamment l’Amérique latine et l’Afrique. La seule chose qui me frappe, c’est dans tous ces groupes un désir de ferveur, de fraternité alors que nos célébrations ou notre proposition de foi paraissent trop désincarnées ou abstraites.


Frère Jean-Michel Poffet est né en 1944 à Fribourg, en Suisse. Il est entré dans l’Ordre en 1964. Il a fait son noviciat et deux ans de philosophie en Belgique. Il a ensuite étudié la théologie à l’Université de Fribourg. Il a été ordonné prêtre en 1970. Après deux ans de ministère pastoral dans la paroisse dominicaine de Saint-Paul à Genève, il étudie à l’Institut biblique pontifical de Rome et obtient une licence biblique en 1975. Après trois ans de ministère à Genève, il retourne à Fribourg et obtient un doctorat en théologie en 1984. Il est nommé professeur associé à la faculté de théologie de l’université de Fribourg. Il est cofondateur et président de l’Association biblique de Suisse romande. En 1999, il est élu directeur de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, puis réélu à deux reprises jusqu’en 2008. En 2007, il rejoint l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem avec le grade de commandeur. Le 1er janvier 2009, il a été décoré de la Légion d’honneur par le gouvernement français. Le 15 septembre 2023, il reçoit du Maître de l’Ordre le diplôme de Maître en sacrée théologie. Il est élu prieur à plusieurs reprises et régent des études pour sa province. Il continue à donner des cours, des retraites et des conférences, notamment dans des monastères et pour des communautés religieuses, ainsi que dans les médias. Il est l’auteur de nombreux articles et ouvrages d’exégèse, avec un accent particulier sur la théologie biblique et l’importance spirituelle de l’étude de l’Écriture. Plusieurs de ses ouvrages de théologie biblique ont été traduits en différentes langues.

  1. Il s’agit d’un diplôme honorifique délivré par le Maître de l’Ordre, sur recommandation du Conseil général, conformément à certaines exigences relatives à l’octroi de ce diplôme. Le titre remonte à 1303, lorsque le pape de l’époque, Benoît XI, un dominicain, a créé ce diplôme pour que l’Ordre des Prêcheurs puisse accorder la faculté d’enseigner la théologie. Aujourd’hui, il s’agit d’un titre honorifique et exclusivement académique, mais c’est la plus haute reconnaissance de l’excellence dans les sciences sacrées au sein de l’Ordre des Prêcheurs. ↩︎